Sentiments et émotions

La seule possibilité de se libérer d’une émotion est de la ressentir !

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En général les êtres humains pensent leurs émotions.

A ce niveau, aucune liberté n’est possible. C’est dans le ressenti de la peur, ou de la colère, ou de l’anxiété, ou de la jalousie ou de la culpabilité que l’émotion (message affectif) se libère. L’émotion est corporelle. Le mental est une expression du cerveau.

La pensée (message conceptuel) a sa propre beauté mais elle n’a pas la capacité de nous libérer de l’émotion. Si vous vous rendez disponible sensoriellement, il y aura vraiment une voie de sortie pour l’émotion.

Bien sûr, la pensée a sa place, mais la pensée qui vient des émotions est polluée. La pensée qui vient du cœur n’est accessible que dans la liberté vis à vis de ses propres émotions.

(Eric BARET, philosophe)

 
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Pour guérir de la mort, il faut pleurer !

Extrait du livre de Myriam Cohen-Welgryn, La Petite dernière, éd. Arléa, 99.

Dans les tribus indiennes, on dit qu’il ne faut pas laisser le mal se blottir. 
Il faut le faire jaillir du corps, gicler hors de la peau comme les pépins de baies sauvages. 
Il ne faut pas lui donner de prise. Car le malheur est habile. 
Il plonge dans les parties vitales de l’organisme, s’insinue dans les recoins les plus inaccessibles, se love dans les viscères et jusque dans la bile. 
Et il les anémie.

Ensuite, il leur ôte le goût de vivre. 
Alors le cœur se ternit, les yeux s’engorgent. Et comme le dos se courbe, le teint se flétrit. Non, le chagrin, cela se chasse, comme les pépins de raisin. 
Pour l’extirper, il ne sert à rien de se gratter la chair et le sang.

Il lui a dit - et elle le croit car c’est un grand sorcier -, il lui a dit que l’eau salée est le meilleur des remèdes.

Les Indiens enduisaient leurs malheureux de cataplasmes marins. 
C’est parce que le mal fond dans l’eau salée. 
C’est parce que l’eau de mer agit sur la peau comme par osmose. 
Elle aspire les larmes à la surface. 
Pendant des jours et des jours, il faut s’humecter sans cesse. 
Alors le malheur se dissout dans les larmes, se délite à petites gouttes pour sourdre hors du corps par les yeux.

Pour guérir de la mort, il faut pleurer.

Extrait du livre de Christophe Fauré, Vivre le deuil au jour le jour

On avait jusque-là plus ou moins cru à une justice, à une sagesse inhérente à “l’ordre des choses”… et soudain son enfant se noie, son épouse meurt en couches ou son compagnon se tue. 
Là tout vole en éclats. 
Le fragile édifice de ses croyances et de ses convictions se trouve violemment ébranlé et on vient à se demander si on ne s’est pas trompé ou si on n’a pas été trompé. 
On est (…) en colère contre la destinée. 
La révolte est soit, brutale et explosive, soit insidieuse et rampante, quand, au fil des mois, tout ce à quoi on avait cru s’effrite. 
L’épreuve est difficile… car c’est un système essentiel de repères et références qui est mis en cause… 
Il est certain que l’on ne peut s’empêcher de ressentir ce qu’on ressent ! 
Pour l’instant, la colère est présente, il faut en tenir compte. 
Si le chemin du deuil passe par elle, c’est qu’elle a manifestement sa raison d’être.

La personne endeuillée est portée à se faire des reproches du genre :

Pourquoi ne lui as-tu pas parlé avant qu’il ne parte ?… Tu aurais dû lui dire plus souvent que tu l’aimais… Pourquoi ne t’es-tu pas réconcilié avant qu’il ne meure ?… Tu aurais dû en prendre soin davantage… Tu as été stupide, regarde comment tu as agi…

Souvent, la personne endeuillée a tendance à se comparer aux autres :

Regarde comme elle est courageuse, elle ne fait pas d’histoires, elle… Si tu avais été prévoyante comme ton mari te l’avait dit, ça ne serait pas arrivé… 

Ce genre de dialogue intérieur est très épuisant. Il ronge les forces et fait qu’à la fin on s’accuse. Il crée même de petits états dépressifs. 
Il arrive souvent que la culpabilité obsessionnelle provienne de ce que l’on n’a pas dit tout ce qu’on avait sur le cœur à la personne disparue. Le non-dit se retourne contre soi et se fait accablant. A d’autres moments, on est tellement épuisé (…) que l’on ne peut supporter la charge émotive du deuil. Des frissons nerveux parcourent le corps, comme des mouvements d’anxiété. 
La culpabilité existentielle est, au contraire, l’acceptation du fait d’être des humains limités, avec des faiblesses, des défauts et la capacité de faire des erreurs. 
Le grand remède à la culpabilité obsessionnelle, c’est de se reconnaître démuni, impuissant, faible devant les malheurs qui dépassent les forces humaines. En un mot, c’est « accepter les limites humaines ».

Savoir faire la différence entre les deux !

Extrait du livre de Jean Monbourquette, Aimer, perdre, grandir, Bayard Editions/Centurion, 4e édition, 1995.

L’isolement, c’est…

La peur des autres, l’ennui éprouvé parce qu’on est seul avec soi-même. 
Une protection contre toute intrusion de l’extérieur. 
Le désarroi et la confusion de son monde intérieur. 
Les ruminations et le verbiage intérieur. 
L’angoisse devant sa fragilité et la peur d’être de nouveau rejeté. 
Se fermer aux autres par crainte d’être agressé. 
Des moments d’agitation intérieurs.

La solitude, c’est…

Le retrait sur soi pour être plus présent avec soi-même.
Le besoin de se recueillir pour se faire de la place.
Rechercher la paix entre ses différents « moi ».
Accepter sa vulnérabilité et reconnaître que l’on peut dépendre des autres.
L’intimité avec soi-même qui permet de s’ouvrir aux autres.
L’harmonie des diverses parties de soi.

 

Tristesse n’est pas dépression.

La dépression marque un échec du deuil. La tristesse est une étape. 

Elle signe l’accomplissement du deuil. Elle permet à la fois de progresser vers l’acceptation de la réalité et de se retrouver, de se reconstruire dans son identité propre. 

L’énergie est tournée vers l’intériorité. Soyez égoïste, ou plutôt égotiste quand vous êtes triste. Préoccupez-vous de vous, de vos besoins. Laissez les autres s’amuser, ne cherchez pas à les suivre, ce n’est pas le moment pour vous. Il y a une étape nécessaire à la reconstruction. Une période de tristesse est une période de désinvestissement de l’extérieur et d’investissement de soi.

Je ne peux pas pleurer toute la journée sur mon nombril ! » Il ne s’agit pas de pleurer sur son nombril, mais dans son nombril. Sangloter vraiment dans son ventre pour se libérer de la souffrance, pour traverser l’épreuve. Trouvez quelqu’un, un ami, pour pleurer dans ses bras. Vous ne serez plus seul, mais entendu dans votre souffrance, vous vous sentirez reconnu, accepté, ce qui aide à ne pas se dévaloriser ou à retourner contre soi ses émotions. 
Vous sortirez de l’épreuve fatigué et consolé plutôt que « vidé » (à condition bien sûr de faire vraiment confiance à l’autre et de vous permettre de recevoir ce qu’il vous donne). Et puis, vous pourrez vous autoriser à entrer plus profondément dans l’émotion. Il vous protégera, fournira un cadre dans lequel vous pouvez vous abandonner.
La dépression, rumination morose, se laisse difficilement distraire. On a tendance à choisir des activités qui restent dans une tonalité affective terne. La tristesse, même profonde, accepte d’être éclairée un instant par le rayon lumineux d’un rire.

Isabelle Filliozat, L’intelligence du cœur, Éditions Jean-Claude Lattès, 1997.

Définition donnée par Jean Monbourquette, auteur du livre Aimer, perdre et grandir

Pardonner, ce n’est pas oublier l’offense ou l’abandon, 
Ce n’est pas excuser l’autre, 
Ce n’est pas nier ses émotions et ses sentiments, 
Ce n’est pas l’effet d’un coup de volonté, 
Ce n’est pas nécessairement se réconcilier avec l’autre. 
Pardonner, c’est d’abord se libérer du désir de vengeance et du ressentiment (…) 
C’est libérer l’autre de sa dette et lui vouloir du bien (…)

L’espoir est essentiel à notre vie affective, mais si l’on nous demandait de le définir, nous serions sans doute bien embarrassés. La plupart d’entre nous le confondent avec l’optimisme, cette attitude qui consiste à croire que « tout ira pour le mieux ».

Mais il existe entre les deux une différence fondamentale.

L’espoir ne résulte pas d’une incitation à « positiver » ni d’une capacité à voir l’avenir en rose. L’espoir, contrairement à l’optimisme, ne transige pas avec la réalité. Bien qu’il soit impossible de le cerner une fois pour toutes, j’ai forgé cette définition qui me semble bien résumer ce que m’ont appris mes patients.

L’espoir, c’est le sentiment exaltant que l’on éprouve lorsque l’on croit à la possibilité d’un avenir meilleur. En tant que tel, il tient compte des embûches qui ne manqueront pas de se dresser en travers de notre route et n’accorde pas le moindre crédit aux illusions trompeuses.

L’espoir, lorsqu’il s’accompagne de lucidité, nous donne le courage de faire face à l’adversité et de surmonter les coups du sort. Garder espoir s’est révélé pour mes patients aussi efficace que n’importe quel traitement. Et ce n’est qu’après bien des années de pratique que j’en ai pris conscience.

Jérôme Groopman 
Chercheur et cancérologue américain